Les Chroniques de Lucullus n°384
Amis gourmands bonjour,
Vive les teutons
Les brasseurs allemands sont en colère et on les comprend. L'Allemagne est le premier producteur européen de bière.
C'est donc une affaire on ne peut plus sérieuse lorsqu'on parle de qualité avec eux.
Des textes fort anciens régissent le monde de la bière outre Rhin.
Le décret de pureté de la bière, vieux de 500 ans, stipule que seuls doivent être utilisés pour la confection de la bière, du houblon, du malt, de la levure et de l'eau PURE.
Mais qu'est ce qui les a mis dans cet état?
Le gaz de schiste ou plutôt son extraction par fracturation hydraulique.
Un texte de loi en préparation outre Rhin veut autoriser sous conditions cette extraction.
Une de ces conditions est que les extractions ne se trouvent pas à proximité des nappes phréatiques.
On pourrait penser que cela est bel et bon, mais non.
La bière est une affaire sérieuse et la qualité de l'eau utilisée, tout comme pour le whisky est primordiale.
Le problème c'est que nombre de brasseurs utilisent des sources qui ne seraient pas en zone protégée et donc toute la filière brassicole pourrait être remise en cause et serait en danger.
Les filières pétrolières via Exxon ou BASF poussent le gouvernement à agir, le patronat allemand tempête car il juge ce refus comme étant un frein à l'activité économique.
Outre-Rhin, les brasseurs ne sont pas les seuls à s'opposer à la fracturation hydraulique.
Jusqu'à présent, l'utilisation de cette technique, interdite en France depuis la loi du 13 juillet 2011, était soumise à l'approbation des Etats-régions.
Or, dans ceux qui disposent des sous-sols riches en gaz de schiste, en Rhénanie-du-Nord-Westphalie et Basse-Saxe, la population y est profondément hostile et les autorisations n'ont jamais été accordées.
Le projet de loi ne pourra pas être présenté avec les élections législatives de septembre.
Le Bundesrat, parlement fédéral allemand, est opposé à la fracturation hydraulique sauf si:"
"Une modification de la qualité de l'eau pouvait être exclue de façon non équivoque"
Cela laisse peut de chance en l'état pour les pétroliers.
L'enjeu est néanmoins de taille à long terme. Les réserves étant estimées à 30 années de consommation du pays.
Je ne suis pas contre le gaz de schiste mais totalement opposé à la fracturation hydraulique qui est une cochonnerie absolue. La qualité de l'eau étant menacée, c'est l'ensemble des productions agricoles, élevages compris , qui sont fragilisées et menacées.
Petites bêtes pas très sympathiques
Cette semaine, une autre nouvelle, peu réjouissante nous est venue d'Allemagne.
Elle concerne Harmonia axyridis qui derrière un nom abscons cache une bête à bon dieu, une coccinelle.
Une coccinelle certes mais pas n'importe laquelle. Il s'agit d'une espèce invasive venue d'Asie et qui selon l'institut de phytopathologie de Giessen et son article publié dans la revue Science, est immunisée contre des parasites qu'elle transporte et transmet à d'autres coccinelles du cru.
C''est en ayant étudié l'hémolymphe, c'est à dire le sang, de cette bête à bon dieu, que l'institut allemand a détecté des microsporidies, parasites, mortelles pour d'autres races de coccinelles mais dont Harmonia axyridis ne craint rien.
Et pourtant cette espèce est largement utilisée depuis 70 ans, dans la lutte contre les pucerons et comme alternative aux insecticides.
Que faire donc?
Commission européenne – Fraude – Stupidité et Lobbies
La lutte contre la fraude c'est bien.
La schizophrénie de la commission européenne c'est mal.
Jeudi 23 mai, la commission européenne, a jugé que l'huile d'olive servie sur les tables de nos restaurants n'était pas assez hygiénique. Jugez, chers amis, de l'importance cruciale de cette étude alors que l'Europe croule sous le chômage et la crise.
Comment? Est ce qu'on les paie?
Ah mais oui, tout à fait et grassement, si je puis dire en parlant d'huile.
Les petites fioles d'huile de nos restaurants ne seraient ni hygiéniques, disais je, mais également non garantes de la qualité de l'huile.
Sous la pression des lobbys de l'industrie agro-alimentaires la commission préconise que l'on serve des dosettes d'huile individuelles. Ça va être pratique pour faire sa vinaigrette soi même.
Bref via la procédure de comitologie, qui permet à des représentants des pays membres, issus des administrations nationales de dialoguer avec la commission permettant d'adopter des décision dans divers domaine, la commission européenne avait pondu un texte demandant l'instauration de dosettes individuelles ou pour le moins de bouteille à bec verseur inviolable.
On voit bien là l'industrie pointer son nez.
Par contre les administrations tant européennes que nationales n'arrivaient pas à fournir la preuve de fraudes fréquentes sur l'huile d'olive.
Des associations sont alors montées au créneau, comme Copa-Cogeca, et ont obligé des politiques à se saisir de la question.
David Cameron a jugé que l'Union européenne avait autre chose à faire que de s'occuper de cela et devait se tenir à l'écart.
L'homologue néerlandais du premier ministre anglais, Mark Rutte parlait lui de mesure trop étrange pour être commentée.
La presse américaine s'est même gaussée de la commission. Le Hérald Tribune ironisait de la sorte:
"L'économie européenne ploie sous l'austérité et le chômage, mais l'UE a trouvé le temps d'approuver un changement dans la manière dont l'huile d'olive doit être servie".
Bref cela commencer à sentir vinaigre pour le commissaire Dacian Ciolos, chargé de l'agriculture et sentir vinaigre quand on parle d'huile cela manque de sérieux, vous en conviendrez.
Du coup, Dacina Ciolos a du faire son mea culpa:
"Il est clair que cette mesure ne dispose pas du soutien du consommateur", déclarait-il jeudi, annonçant une "consultation" et des "alternatives". Et l'enterrement en première classe de ce projet.
Champagne
Je vous ai parlé dernièrement des américains qui ne veulent pas d'appellations contrôlées ou qui plutôt veulent pouvoir les utiliser comme bon leur semble. Au demeurant les russes font de même.
Une bonne nouvelle cependant nous vient de Chine, premier fraudeur au monde, qui a décidé de protéger l'appellation Champagne dans son pays.
La diplomatie a bien fonctionné. C'est lors de son voyage en Chine que François Hollande a pu aider le comité interprofessionnel des vins de Champagne, CIVC, à obtenir un accord sur la question.
Désormais la Chine protègera cette appellation et les nombreux fraudeurs pourront être poursuivis sur place.
La question est d'importance lors qu'on pense qu'en 2001, la Chine a importé 50 000 bouteilles de Champagne, mais qu'en 2012, ce ne sont pas moins de 2 millions de bouteilles qui sont arrivées dans l'Empire du milieu.
La Chine est le 5ème marché en termes de ventes en dehors de l'Europe.
Jean-Luc Barbier, DG du CIVC rappelant que l'indication géographique (IG) constituait un droit de propriété intellectuelle spécifique.
Mais les dessous de l'affaire sont bien plus importants qu'on ne pourrait y penser.
Les Russes et les Américains produisent des mousseux qu'ils appellent Champagne. Les portes de la Chine leur sont maintenant fermées.
Méduses – surpêche - gastronomie
Chaque année les méduses sont de plus en plus nombreuses sur nos côtes mais aussi au large.
C'est un vrai problème écologique certainement lié à la surpêche qui, diminuant les stocks halieutiques, raréfie également le nombre de prédateurs des méduses.
Certains experts préconisent de manger des méduses.
Oui mais avec quelles sauces? Beurre nantais, Suchet, Aïoli...
D'autres plus pragmatiques disent qu'il faut s'intéresser à la Turritopsis nutricula dite méduse immortelle, qui serait capable d'inverser le processus de vieillissement.
Autre souci et pas des moindres c'est que les méduse mangent et mangent du poisson...
La boucle est bouclée car on rajoute là un nouveau prédateur de haute volée, à la surpêche humaine.
Et nos pêcheurs qui veulent toujours plus de subventions sont en train de tuer les mers et les océans.
A ce sujet le 29 et 30 mai, le parlement européen et les pays de l'union européenne ont trouvé un accord pour une pêche plus durable en limitant la surpêche.
47 % des stocks de poisson en Atlantique et 80 % en Méditerranée sont affectés par la surpêche.
Le compromis obtenu à l'arraché prévoit de limiter à 5 % la quantité des poissons non commercialisables pouvant être rejetés par-dessus bord car trop petits, abîmés ou hors quota, et qui représentent aujourd'hui jusqu'à un quart des prises de l'Union européenne. Dorénavant les pêcheurs devront débarquer ces poissons. Ce qui les incitera pense t-on à ête plus sélectifs.
L'Irlande qui assure jusqu'à fin juin la présidence de l'Europe veut, nous dit Simon Coveney, son ministre de l'agriculture, régler l'épineux dossier de la réforme de la politique commune de la Pêche.
Déjà courant mai le parlement qui prônait la fin de cette pratique avait assoupli sa position pour permettre un passage de 7% à 5% du taux de rejet. Cela permettait de contenter les eurodéputés mais aussi les deux grands pays pêcheurs que sont la France et l'Espagne.
Disons le tout net sur cette histoire de rejets, mais aussi sur d'autres liés aux ressources halieutiques, nous n'avons pas le cul propre. Lorsqu'on connaît les trafics liés aux saisies de thon en méditerranée on se dit que les pêcheurs français vont encore pouvoir longtemps ne pas respecter la loi.
Comment dit-on Justin Bridou en chinois?
Vous connaissez tous la pub de Justin Bridou, le saucisson pur porc bien de chez nous?
Déjà, c'était une ânerie car cette société appartenait, tout comme Cochonou ou Aoste à Smithfields Foods mais pour 7,1 milliards de dollars Shuanghui la chinoise vient de la racheter.
Smithfield, premier fabricant américain de hot-dog vient donc d'être racheté par la maison mère du premier producteur de porc de Chine. Smithfiled conservera tout de même son siège historique en Virginie.
Cette société américaine prépare et distribue de la viande de porc mais aussi des jambons, du bacon, des saucisses et de la charcuterie dans 12 pays dont la France, l'Allemagne, l'Italie, les Pays-Bas, la Pologne, la Roumanie, l'Espagne et le Royaume-Uni.
Conséquences de tout cela me direz vous?
Une tendance haussière sur le jambon et les hot-dog.
En effet Smithfield va certainement exporter une plus grande partie de sa production en Chine et ainsi provoquer des tensions en terme de quantité et d'offre et donc de prix sur la viande de porc.
Sur ces quelques mots je vous souhaite une excellente semaine.
Gastronomiquement Votre, Lucullus
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