Les Chroniques de Lucullus n°498
Amis gourmands bonjour,
Les goût des œufs
Sur le site de l'hôtellerie restauration il y a un blog que j'aime beaucoup. C'est celui d'Hervé This.
Hervé This est un scientifique, physico chimiste co-inventeur avec Nicholas Kurti de la Gastronomie moléculaire.
Il ne faut pas confondre la Gastronomie moléculaire avec la cuisine moléculaire qui en est une application pas, toujours heureuse, selon moi.
La gastronomie moléculaire consiste à expliquer scientifiquement et par l'expérience, ce qu'il se passe avec les produits lorsqu'on les cuisine.
Précisions importantes :
Les parties en italique sont des retranscriptions des réponses d'Hervé This.
Je les cite car l'accès du site est réservé aux abonnés
Dans ce blog, le 28 février dernier, il répondait à de nombreuses questions et notamment celles ci.
Y a t-il des différences entre les œufs de poules de plein air, bio, de batterie, etc ?
Existe t-il des molécules de goût, de saveur ?
Il ressort des explications du scientifique, et sur la base d'une expérience menée en 1993 par des chercheurs anglais que quelque soit la méthode de production le goût est identique.
Je cite Hervé This :
"On a présenté à un groupe de personnes des œufs de grosseurs et de couleurs différentes en précisant qu'ils avaient été pondus par des poules de différents élevages, nourris de différents aliments, farines animales ou poissons, granulés, végétaux divers, etc.
Puis on a cuit ces œufs tous de la même manière pour évaluation. Les testeurs ont trouvé, outre des teintes du jaune variées, des goûts de poisson, de farine, de "véritables goût des œufs" et autres notes diverses. Les meilleures notes étaient données aux œufs gros et à la couleur foncée. Tandis que ceux de couleur pâle étaient jugés de qualité inférieure..."
Mais les œufs provenaient d'un même élevage avec des poules des races différentes mais nourries de la même manière
Un deuxième groupe qui a testé les mêmes œufs à l'aveugle a jugé la qualité constante.
Dernière réponse d'Hervé This :
Personnellement, je n'ai jamais trouvé de différence réelle entre tous les œufs -bio, élevages, de poule, de caille, de cane, d'autruche même- que j'ai pu mangé. (mais pas ceux de tortue !)
La valeur nutritionnelle est-elle différente ?
Hervé THIS répond qu'il y a des différences de goûts mais que ceux ci ne proviennent pas de la race de la poule mais de son alimentation.
De ce fait et c'est important, l'industrie agro-alimentaire s'est penchée sur le sujet et adapte l'alimentation des poules afin d'augmenter la teneur des œufs en résidus d'acides gras de type oméga 3.
Hervé This ajoute avoir fait une rapide passage par Google Scholar et y avoir trouvé de très nombreux articles où les effets de l'alimentation des poules sur la composition des œufs sont mesurés par des instruments d'analyse chimique, ce qu'il considère comme une validation bien supérieure par rapport aux tests gustatifs.
L'albumine et les protéines sont-elles standard en goût, en saveur et en valeur nutritionnelle ?
Hervé This met en garde contre la notion d'albumine dans le blanc des œufs.
"Attention, enfin, à propos d'albumine : c'est une notion parfaitement périmée.
Les protéines du blanc d’œuf doivent être nommées... des protéines, car il y en a diverses sortes, et pas seulement des albumines."
A ce sujet allez lire le glossaire des métiers de bouche d'Agro-Paris-Tech cité dans les sources
Et les protéines, étant des polymères, n'ont aucun goût.
Leur valeur nutritionnelle est invariable, puisqu'elle dépend de leur composition en résidus d'acides aminés, laquelle est codée génétiquement.
L'odeur du blanc d'oeuf
Hervé THIS explique que le blanc d’œuf cru n'a pas de goût, mais qu'il en a quand même un peu je cite " en raisons des ions minéraux qui sont dissous dans ses 90 pour cent d'eau".
Cuit, il en est tout autrement pour le goût et l'odeur. Le chimiste l'explique par le chauffage des protéines qui libère un gaz nommé hydrogène sulfuré, qui est d'ailleurs toxique à fortes doses, et d'autant plus pernicieux que le premier signe de son intoxication est qu'on ne le sent plus.
À une réponse d'un des blogueurs sur la composition des protéines il précise :
Ce n'est pas vrai que les protéines sont composées de carbone, azote, hydrogène et oxygène : les résidus d'acides aminés de type cystéine contiennent aussi du soufre. Et les protéines sont liées à des groupes phosphate, qui contiennent du phosphore, par exemple, sans compter que certaines protéines transportent du fer, ou du zinc.
La composition du jaune d’œuf
Quels composés pour le jaune d’œuf ? Il y en a des centaines, mais la liste n'a guère d'intérêt. A noter que le chauffage du jaune, également, libère l'hydrogène sulfuré. Plus généralement, le "goût d’œuf" est souvent dû à ce composé.
Source : Hôtellerie Restauration (Abonné) / blog Hervé This
http://www.lhotellerie-restauration.fr
Source Agro Paris Tech
http://www.agroparistech.fr/1-Glossaire-des-metiers-de-bouche-en-chantier-pour-toujours-merci-de-contribuer.html.
Retour sur la basse température
et toujours les réponse d'Hervé This mais c'était en 2007.
Ce qui prouve, au demeurant, que ce genre de cuisson n'est pas nouveau.
A quoi sert la cuisson basse température mais d'un point de vue scientifique ?
Elle sert à dissoudre le collagène des viandes afin de les rendre plus tendres.
Le reste, c'est à dire le choix des températures et des cuissons est une affaire de goût.
Les réponses d'Hervé This sont plus explicites que je ne pourrai le faire, donc je cite :
Il y a deux questions : la qualité sanitaire (qui impose des couples temps/température qui dépendent de nombreux paramètres, notamment le pH)et la consistance, qui se modifie avec la température.
Il y a des listes de températures de transitions différentes pour l’œuf, les viandes, etc, mais chacun cuit comme il veut, avec le résultat qui lui plaît.
Il n'existe notamment pas de "juste température", sauf celle que l'on aime le plus.
Pour les types d'aliments pouvant être cuits à basse température, tout dépend du résultat que l'on veut obtenir.
A basse température, chacun cuit comme il veut.
La question de la microbiologie est différente de la question culinaire, et chaque ingrédient a ses caractéristiques.
Mieux encore, la cuisson à basse température est surtout intéressante pour bien dissoudre le collagène des viandes un peu dures, et conserver toute la matière dans la viande.
Une heure de plus ne peut faire que du bien.
Attention : une règle que je crois bonne (même si elle est un peu restrictive) : ne pas descendre en dessous de 60°C (il y a déjà eu des accidents!)
Question : mais pour le temps??ou alors j'utilise une sonde à cœur
Hervé This (extraits)
Le temps ne compte pas!
Imaginons un morceau de gite un peu dur, qui pèse 1 kilo.
Si je le cuis à 70 °C pendant un temps tel que la température atteigne 70° à cœur, la coagulation de la viande est faite, partout, homogène.
Maintenant, cette durée ne sert à rien, parce que, ce qui nous intéresse, dans ce cas, c'est surtout d'attendrir la viande.
Ma proposition :
vous la laissez à cette température pendant une ou deux journées, voire trois, quatre, ce que vous voulez.
Plus vous cuirez ainsi longtemps, plus le tissu collagénique sera dissocié, et plus vous aurez :
- un attendrissement
- du goût, parce que l'hydrolyse de ce tissu collagénique aura engendré des acides aminés.
Il ne faut pas utiliser les basses températures (dans ce type d'utilisation) pour cuire peu de temps, mais le plus longtemps possible.
Et si vous avez dans le même temps, dans un four (ou bien dans un bain, des poches plastiques) plusieurs produits en permanence, vous optimisez beaucoup.
Par exemple, il nous est déjà arrivé de faire des œufs à 67° au nombre de 1000 en une fois : le four étant plein, nous sommes partis nous coucher, et nous avons trouvé les œufs le lendemain matin.
Dans un tel cas, une heure de plus ou de moins ne change absolument rien.
Source : Hôtellerie Restauration (Abonné) / blog Hervé This
http://www.lhotellerie-restauration.fr
Chef étoilé raisonnable
Tout le monde sait bien qu'un restaurant ayant obtenu une étoile Michelin va augmenter ses prix car on lui demande toujours plus de qualité tant dans l'assiette qu'en salle et que cela a un coût non négligeable.
En aparté, le Michelin attribue des macarons et non des étoiles mais par habitude on parle d'étoiles, dont acte.
Dans le département des Pyrénées Orientales, il y a toutefois un chef qui a décidé de ne pas augmenter ses prix.
Pierre-Louis Marin de l'Auberge du Cellier à Montner a décidé de maintenir son menu complet pour 19 € et ceci depuis 3 ans, date de sa distinction par le guide Michelin.
Le chef précise que ce n'est pas là une décision commerciale mais plutôt la fidélité à lui même.
Il explique ses choix par la constance en cuisine.
Cuisine gastronomique tournée vers son terroir et qu'il magnifie avec produits de producteurs locaux.
Fidélité à ce qu'il est mais aussi envers les habitués de son petit village de 320 habitants habitués à fréquenter l'établissement. C'est pourquoi on y trouve une menu de déjeuner à 19 € (entrée, plat et dessert).
Comment peut on réussir un tel challenge, être l'étoilé le moins cher de France ?
En luttant en permanence contre un fléau bien connu, le gaspillage alimentaire.
Le gaspillage est une hérésie et un scandale tant moral qu'économique.
Le credo de Pierre-Louis Marin est simple : Ne rien jeter.
Je cite
"Quand on achète des fruits, on essaye de tout utiliser, c'est la même chose pour les poissons, en faisant par exemple des soupes avec les arêtes".
Idem pour la viande, "On n'achète pas les pièces de viande à l'unité, mais on va privilégier, par exemple, une grosse pièce de bœuf dont on va garder le filet pour un plat, l'entrecôte pour un autre, et on va préparer une belle blanquette ou un sauté avec les bas morceaux pour le menu à 19 €."
Certes le bouche à oreille a fait son effet et la clientèle s'est accrue et pas seulement pour ce menu d'appel.
Les chiffres clés d'un restaurant sont le taux de fréquentation de l'établissement, le chiffre d'affaire mais ce que l'on suit avec attention c'est le ticket moyen.
Ce dernier à l'Auberge du Cellier est passé de 75€ à 65 € mais est bien compensé par l'augmentation de la fréquentation.
Ce qui permet aussi un lissage de l'activité sur la totalité de l'année ;
Source : Hôtellerie Restauration (Abonné)
http://www.lhotellerie-restauration.fr
Sur ces quelques mots je vous souhaite une bonne semaine.
Gastronomiquement Votre, Lucullus
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