Les Chroniques de Lucullus n°362
Amis gourmands bonjour,
La vallée du Rhône est un haut lieu de la gastronomie française.
Personne n'en doutait, mais il convient de temps en temps de le rappeler et d'en apporter les preuves tangibles.
Deux événements sont venus nous les apporter.
Tout d'abord à Saint Péray en Ardèche le 13 octobre puis à Tain le 3 décembre.
Remontons le temps.
Cela s'est passé chez Chapoutier, célèbre vigneron de Tain, bien connu pour ses vins de hautes
tenue que cela soit des Hermitage, ou des Côtes rôties ou encore des Chateauneuf du Pape.
Ce 3 décembre, chez Chapoutier donc, a eu lieu l'édition 2012 du meilleur pâté croûte.
Les Lyonnais disent pâté croûte et les Parisiens pâté en croûte mais il s'agit de la même chose.
Le pâté croûte ce n'est pas rien. Il fait, de nos jours, partie intégrante de l'histoire de la gastronomie française mais on le sert depuis l'antiquité.
C'est au XVIème siècle que Gace de la Bige rédige la première recette de pâté croûte. Il renferme pas moins de 3 gros perdreaux, six grosses cailles et une douzaine d'alouettes.
Richelieu grand amateur y fait rajouter un médaillon de foie gras en son centre. C'est devenu le célèbre pâté en croûte Richelieu. Déjà le foie gras mais celui ci est connu également depuis l'antiquité égyptienne, car ce sont les égyptiens qui l'ont inventé.
De nos jours, ces pâtés croûte ont une image un peu canaille par leur contenu, à base de viande de porc. On les trouve à la table des plus grands mais aussi au bistro du coin où le patron fait lui même sa cuisine et qu'on arrose avec une côte mâconnaise ou un beaujolais.
Ce championnat on ne peut plus sérieux, le quatrième du genre, avait pour jury des grands noms de la cuisine. Excusez du peu mais je ne résiste pas à vous les citer tous.
- Anne-Sophie Pic – Chef***
- Régis Marcon – Chef***
- Emmanuel Renaut – MOF Cuisinier et Chef***
- Guillaume Gomez – MOF Cuisinier
- Christian Tetedoie – MOF Cuisinier et Chef*
- Mathieu Viannay – MOF Cuisinier et Chef**
- Sébastien Bouillet – Pâtissier
- Eric Desbordes – Chef – Champion du Monde de Pâté Croûte 2011
- Christian Née – MOF Cuisinier et Chef**
- Vincent Le Roux – Directeur Général du Restaurant Paul Bocuse***
- Emmanuel Giraud – Journaliste et auteur de L’Anthologie fabuleuse, fallacieuse et facétieuse du pâté en croûte
- Gilles Giroud – MOF Charcutier
- Michel Chapoutier – Vigneron de la Vallée du Rhône
- Gilles Demange – fondateur du concours
- Arnaud Bernollin – fondateur du concours
- MOF pour Meilleur ouvrier de France
12 finalistes
- Martial Facchinetti – Le Pont de Brent** (Brent – Suisse)
- Frédéric Cote – Au Colombie (69)
- Pierre Maillet – Hameau Albert 1er ** (74)
- Yannick Decelle – Le Caro de Lyon (69)
- Yohan Lastre – La Tour d’Argent* (75)
- Cyril Malard – EelleIxir (69)
- Julien Shapiro – Range (Washington – Etats-Unis)
- Geert Weyn – Restaurant Dome* – (Anvers – Belgique)
- Eric Rotivel – Daniel et Denise (69)
- Eric Rabazzini – La Place de Mougins (06)
- Stéphane Herrenberger – Hotel de Paplais (64)
- David Guillermain – 33 Cite (69)
4 lauréats
- Martial Facchinetti
- Stéphane Herrenberger
- David Guillermian
1 Vainqueur
- Yohan Lastre de la Tour d'Argent à Paris
Alors oui voilà un beau champion qui fait honneur au métier et à la gastronomie et dont on peut être fier. Alors prêt à casser la croûte avec moi?
Cependant un peu plus tôt dans la saison, le 13 octobre, pratiquement en face de Tain, à Saint Peray sur la rive droite du Rhône s'est tenu un autre championnat du monde. Celui là, peut être moins prestigieux a, à mes yeux, tout autant d'importance, car beaucoup plus à notre portée en matière de pratique culinaire,
Donc, lors de la fête du goût de Saint Peray s'est tenu le 1er championnat du monde amateur de la caillette.
La caillette, je vous en ai déjà parlé au moins à deux reprises dont une fois cette année. La caillette c'est cette petite boule de viande de porc aux herbes entourée d'une crépine.
Quand on a dit cela, on a tout dit aux amateurs mais rien aux Béotiens.
Il faut savoir que la bataille est rude des deux côtés du Rhône pour déterminer quelle est la vraie caillette. Celle aux épinards ou blettes ou encore celles au chou, avec des abats ou sans abats?
Le débat n'aura pas de fin croyez moi.
D'ailleurs, si vous passez dans le coin, je vous invite à participer au débat en goûtant tour à tour la caillette de Chabeuil (Drôme) ou celle d'Ardèche.
Il en existe d'autres selon que l'on se trouve dans la vallée ou sur les hauteurs du plateau ardéchois.
Du côté de Saint Agrève (07) à deux pas du Chambon/ Lignon (43), tout là haut, elle a un tout autre goût avec des ingrédients très terroir.
Mais revenons à nos festivités. Le 11 octobre il y a eu une présélection qui ne garda que 8 concurrents parmi les 50 postulants.
C'est Annie Bouty, drômoise, qui a remporté cette première édition.
Michel Chabran, chef étoilé, et président du jury a qualifié la réalisation de la gagnante de merveille d'équilibre, 1/3 de viande 2/3 d'herbes. A noter que dans le jury se trouvait une critique gastronomique du New York Times, rien de moins.
Elle n'est pas belle notre gastronomie?
Pour finir cette Chronique je voudrais aborder un sujet beaucoup plus grave, celui de la maltraitance des animaux que l'on mange. Je précise que je tiens à rester dans le domaine qui m'est cher, celui du bien manger et de la bonne nourriture.
Je ne suis pas un défenseur acharné des animaux, et je suis un amateur de viande, de viande de qualité, je tiens à le préciser, là aussi.
En ce moment les défenseurs de la cause animale en ont après le foie gras, fête de noël oblige et font largement dans l'amalgame. Aussi, comme tout ce qui est excessif est insignifiant il convient de rendre un sens à tout cela.
Je ne considère pas l'animal comme étant un égal de l'homme et je ne prête pas aux animaux que nous mangeons, un quelconque anthropomorphisme pour ce qui est des comportements. Pour autant, et c'est important, ce sont des êtres vivants doués pour certains, de réflexions, de sentiments.
L'homme a évolué vers ce qu'il est devenu en tant qu'animal parce qu'il a su manger outre des végétaux, de la viande crue puis cuite. Le régime alimentaire complexe que nous avons adopté nous a permis de nous situer en haut de la chaîne alimentaire et donc de l'évolution.
Ceci est non pas une supposition mais un fait établi par des chercheurs, des scientifiques.
Maintenant, et là je rejoins le combat de ces personnes, qui malgré quelques excès n'ont pas forcément tort, il est inutile d'infliger des souffrances aux animaux de boucherie. Je sais que je suis limitatif en ne parlant que de ces animaux mais c'est ainsi.
On a tous vu des images de cruautés, d'atrocités, de mauvais traitements sur les poules en batterie, les canards en cage engraissés mécaniquement et automatiquement, les cochons fous à manger leurs barreaux et à s'auto-mutiler, les vaches dont on coupe les cornes pour ne pas qu'elles se battent.
Certains se posent la question de savoir pourquoi certaines personnes peuvent avoir un comportement violent. Soyons réalistes, l'homme est violent de nature, parfois il le justifie par des raisons idéologiques, religieuses ou de traditions, mais il est violent envers les autres et lui même. C'est là le propre de sa nature. Je ne pense pas qu'on la changera.
J'arrête là ces considérations pseudo philosophiques pour revenir à la question principale.
Est il normal, voir utile de traiter des animaux de la sorte?
Non évidemment! C'est là la seule réponse possible. Outre les considérations morales, aucune considération technique relative à l'élevage et à l'abattage n'existe.
Les seules considérations pouvant exister, je n'ose dire justifier, ces conditions d'élevages et ces traitements sont des considérations financières.
Je robotise ma chaine de production afin qu'elle me coûte le moins d'argent possible. Ensuite, je fais en sorte de faire croire que ma production est de qualité pour gagner beaucoup d'argent (foie gras). Je peux aussi jouer sur la masse de production comme avec le porc ou les volailles, en les entassant et en leur faisant manger des "choses" qui ne sont pas dans leur régime alimentaire pour mieux les engraisser. Je pense bien évidemment aux farines d'origine animale données à des herbivores, les vaches en l'occurrence.
Je dénonce depuis longtemps ces pratiques qui n'ont rien à voir avec l'élevage traditionnel, même moderne, ou une optique fermière mais qui n'ont de réalité que dans l'industrie agro-alimentaire.
Je le répète encore et encore, le mot important dans cette expression ,n'est pas "agro" ni "alimentaire", mais bien industrie. Ces gens qui n'ont aucune idée de ce qu'est un animal, fut il de boucherie, engraissent des canards, des poules, des vaches et des cochons, comme ils fabriqueraient des chaises pour une grand enseigne.
Parfois les pratiques industrielles dépassent même l'entendement et on en arrive à des extrémités qu'il convient bien évidemment de dénoncer le plus fortement possible, dans l'espoir de les faire cesser.
D'un point de vue lié à la gastronomie, ou plus simplement à l'alimentation en général, ces conditions d'élevage scandaleuses rendent les animaux fous, névrotiques, et produisent de la nourriture de mauvaise qualité ou même nous empoisonnent.
Les animaux battus, blessés ou tout simplement stressés produisent beaucoup de toxines qui rendent la viande mauvaise et peut être même nuisible.
Un herbivore mange de l'herbe pas de la carcasse de mouton sous forme de farine.
La viande que nous en tirons est du muscle. Pour faire muscle, il n'y a pas quarante méthodes, il y en a deux. Vous pouvez prendre une quantité non négligeable de produits dopants type anabolisants ou hormones de croissance ou faire de l'exercice. Je ne pense pas qu'il y ait besoin de plus d'explications.
Je ne parle même pas là des traitements dits préventifs à base d'antibiotiques que l'on retrouve directement dans nos organismes et qui pourrissent ensuite nos eaux mais surtout nous rendent résistant aux antibiotiques, les rendant de ce fait inefficaces.
Je pourrais remplir des pages sur ces sujets mais ce n'est là qu'un billet d'humeur, aussi vis m'arrêter là. Le débat étant ouvert j'y reviendrai forcément à un moment ou à un autre.
L'industrie de la nourriture n'a que faire des conditions de vie des animaux mais aussi des hommes.
Privilégiez un nourriture carnée issue d'élevages utilisant des conditions saines. Il en existe beaucoup, les AOP sont des bons indicateurs même s'ils ne sont pas suffisants. Il vaut mieux payer un peu plus cher mais avoir la certitude que ce que l'on mange est sain et que les animaux ayant fourni leur chair ont été correctement traités et alimentés.
Il y a dans nos champs des bovins qui peuvent ruminer tranquillement, il existe de très nombreux élevages de volailles ou les animaux accourent pour se faire nourrir et même gaver, je l'ai vu.
Les industriels ne nous font manger que ce que l'on veut bien. Refusez d'acheter et de consommer des produits issus de procédés sans contrôles. Soyez vigilants. C'est vous qui payez alors ne payez pas pour vous empoisonner.
Sur ces quelques mots je vous souhaite une excellente semaine.
Gastronomiquement Votre, Lucullus
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