Stohrer - Nicolas

Écrit par Lucullus. Publié dans Les personnages.

Stoher 01Né en 1706 à Wissembourg
Mort en 1789 à Paris

Nicolas Stohrer est né dans une famille modeste du nord de l’Alsace à Wissembourg à la frontière actuelle avec l’Allemagne. A l’âge de 14 ans, le jeune Nicolas commence son apprentissage de pâtissier dans les cuisines du roi déchu de Pologne et grand-duc de Lituanie Stanislas Leszczynski à Wissembourg.

L’ancien roi de Pologne et grand-duc de Lituanie a d’abord trouvé refuge auprès du duc des Deux-Ponts. À la mort de ce dernier, Stanislas est accueilli par le régent de France qui lui met à disposition une résidence à Wissembourg et lui octroie une modeste rente permettant d’entretenir une petite cour dans la cité alsacienne.

Bien qu’ayant des moyens limités, le monarque n’en attache pas moins une grande importance à la qualité de sa table. Le jeune Nicolas, simple garçon de cuisine à ses débuts, devient assez rapidement écuyer de cuisine en charge de la pâtisserie froide et chaude et des ragoûts et entremets. C’est là qu’advient la première fulgurance de Nicolas Stohrer.

Nicolas confectionne pour le roi et sa famille des kouglofs, brioche sèche typiquement alsacienne. Le roi Stanislas aime bien les kouglofs qui lui rappellent les Babkas polonaises mais les trouve un peu sèches à son goût. Là bas, en Pologne, il les arrosait parfois de vin de Hongrie. Il s’en ouvre aux cuisines et Nicolas Stohrer décide alors de revisiter le kouglof en l’imbibant de Madère et en le garnissant de crème pâtissière avec des raisins frais et secs. Le Baba est né mais il ne porte pas encore ce nom.
Baba au Rhum Stohrer

Stoher 02Le nom du baba est sujet à discussion. Une légende voudrait que cela vienne du livre Ali Baba, livre beaucoup apprécié du roi Stanislas mais plus sérieusement je penche pour la version revisitée de Babka qui veut dire grand-mère en polonais. Avec le temps, le rhum supplante le Madère et la crème Chantilly, la crème pâtissière.

En 1725, le roi Stanislas marie sa fille Marie Leszczynska au roi de France Louis XV. Les voilà partis, tout comme Nicolas, alors âgé de 19 ans pour Chambord puis Meudon. C’est à cette époque que Marie Leszczynska demande à son père de lui permettre de prendre à son service le jeune pâtissier. Nicolas Stohrer s’en va donc à Versailles rejoindre la cour du roi.

A la cour de Versailles où Nicolas travaille pour la reine Marie, les puits d’amour créés par Vincent de la Chapelle, pâtissier de Madame de Pompadour, font les délices de la cour. Afin de plaire à la Reine et en s’inspirant des pâtisseries sucrées à pâte feuilletée, Nicolas Stohrer crée une entrée salée. Comme pour le puits d’amour Nicolas Stohrer lui donne un nom à connotation érotique, la Bouchée à la reine. Elle est servie chaude. Elle est réalisée avec une croustade individuelle en forme de timbale, en pâte feuilletée, remplie d’une garniture salée composée d’ingrédients variés – volaille, ris de veau, champignons – coupés en petits dés ou lamelles et liés par une sauce épaisse. Le roi et la cour en sont enchantés.

En 1730, il a alors 25 ans, Nicolas Stohrer décide de tenter sa chance et ouvre une boutique au 51 de la rue Montorgueil non loin de l’église Saint-Eustache, à Paris. Cette boutique existe toujours et c’est la plus vieille pâtisserie de Paris.

Nicolas Stohrer laisse donc à la postérité deux grandes réalisations qui sont aujourd’hui des références en matière de pâtisserie et de gastronomie, le Baba au rhum et la Bouchée à la Reine. On lui doit également d’autres réalisations.

Un peu d’histoire en suivant :
- 1806, dans son Almanach gourmand, Grimod de la Reynière parle du Baba.
- 1815 Antonin Carême, alors cuisinier de Talleyrand, l’évoque dans son -Pâtissiers Royal-.
- 1835 le pâtissier parisien Stohrer, descendant du pâtissier polonais, remplace le malaga par du rhum pour imbiber les babas.
- 1844, cette pâtisserie inspire les frères Julien qui inventent le Savarin
- 1864, elle est décorée par le peintre Paul Baudry. L’immeuble comporte un bas relief qui surmonte le portail : un globe terrestre est entouré des attributs des arts et des lettres.
- 23 mai 1984, la pâtisserie Stohrer est inscrite aux monuments historiques de la France.

Longtemps dirigée par Pierre Liénard, elle a été reprise en 2017 par la famille Dolfi, qui avait précédemment repris une ancienne chocolaterie ouverte en 1761 et dénommée "A La Mère de Famille".

En 1999 les éditons Lattès ont publié des mémoires apocryphes de Nicolas Stohrer. Imaginées par Pierre Liénard et Françoise Duthu, elles ont été rédigées par Claire Haughel.

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