De Casteau - Lancelot

Écrit par Lucullus. Publié dans Les personnages.

DeCasteauLancelot de Casteau
Né à Mons (Belgique)
Décès en 1613

On ne sait que peu de chose de lui si ce n’est ce qu’il dit de lui même.

Toutefois le peu qu’on en connaît est un témoignage fort de la gastronomie de la Wallonie entre le XVème et XVIème siècle. Lancelot de Casteau, même le nom sous lequel il est connu actuellement est sujet à caution. Dans les archives liégeoises il apparaît sous le nom de Anseau de Chestea.

C’est un Montois dont on ne connaît pas la date de naissance ni la filiation.
Il a été admis au métier de boulanger en 1563, de mercier en 1567
Il est le maître-cuisinier de trois princes-évêques successifs de Liège : Robert de Berghes (1520-1564), Gérard de Groesbeek( 1517-1580) et Ernest de Bavière 1554-1612).
En 1557, Il a organisé le banquet de la Joyeuse Entrée de Robert de Berghes. Le détail du menu nous est connu. Il est une des rares traces écrites de la gastronomie Liégeoise.

Il est nommé Bourgeois de Liège en 1571.
Très aisé il possède plusieurs immeubles et terrains.
Vers 1572 il épouse Marie Josselet alias Herck dont il a eu une fille prénommée Jeanne.
A partir de 1601 sa situation financière se dégrade pour ne pas avoir été payé de ses services et frais par le prince évêque de Liège, il est obligé d’aller vivre chez son gendre, l’orfèvre George Gilbert.

En 1604 il publie Ouverture de cuisine dédié à Jean Curtuis, riche bourgeois de Liège
L'ouvrage est le premier livre de recettes publié en français dans cette région et constitue le seul chaînon en langue française entre la cuisine médiévale et la cuisine classique du XVIIe siècle.

L'Ouverture de cuisine
Pendant longtemps on a cru l’ouvrage perdu même si cette œuvre était connue depuis la fin du XVIIIe siècle par une mention du baron Hilarion-Noël de Villenfagne d’Ingihoul, et par deux bibliographes Henri Helbig et Xavier de Theux de Montjardin

C’est en 1958 que la Bibliothèque royale de Belgique, par l’intermédiaire de son conservateur Herman Liebaers, en acquiert un exemplaire, acheté 3000 frs belges à un dénommé Franz Schauwers.

L’ouvrage écrit en "vieux françois" a été traduit en langage moderne par le sociologue et historien belge Léo Moulin et publié en fac-similé en 1983.

L'ouvrage est rédigé en 4 livres :
• Le premier tome s’adresse aux "dames qui se mêlent volontiers de la Cuisine et que l'on trouve besognant en cuisine mieux qu'aucuns Cuisiniers".
• Le deuxième tome traite de la façon de faire de la saucisse de Bologne, et plusieurs sortes de pâtisseries, tant de chair que de poisson marin et autre sorte, avec toute sorte de gelée
• Le troisième tome traite de plusieurs sortes de viande, d'accommoder un grand banquet pour Princes et Princesses, et le petit banquet des Enfants sans souci.
• Le quatrième tome donne la description des mets présentés en quatre services au Banquet servi pour la Joyeuse Entrée du prince-évêque Robert de Berghes, le 12 décembre 1557

Le premier tome donne des indications pour la confection de plat de viande, de tourtes et autres pâtés. Il n’y a pas d’indications de proportions. Toutefois, il indique 9 herbes pour omelettes et 10 pour hochepots. Il a cela d’étonnant qu’il s’adresse aux femmes alors que la grande cuisine n’est pratiquée que par des hommes. Il faudra attendre l’ouvrage de Menon " La cuisinière Bourgeoise" pour trouver un livre mettant l’accent sur la pratique féminine de la cuisine.

Le deuxième tome donne des recettes de gelées (rouge, jaune, grise, noire , verte, violette), des recettes de saucisses de plats italiens, espagnols, hongrois, anglais, … . La variété des couleurs montre bien la recherche d’esthétisme dans la présentation des mets. Les quatre recettes de pommes de terre sont très précieuses pour remonter l’histoire de ce produit. Le fait de donner des recettes étrangères fait de cet ouvrage, le premier livre de recettes internationales.

Le quatrième tome donne la liste des 143 plats qui ont été servis.
Extrait du livre Ouverture de cuisine :

Le banquet de l’entrée de Monsieur Robert de Berges Conte de Walhain, Evesque & Prince de Liege, faict au pallais en Liege, l’an M.D.LVII. au mois de Decembre, comme s’ensuit.

Il y avoit au palais appoincty pour quatorze plats de viandes: la table du Prince estoit de cinq plats.
La deuxiesme table estoit de six plats. La troisiesme table de trois plats de viandes.

Pour le premier service.
Pouille d’Inde bouillie avec des huistres, & cardes, salade d'Espagne.
Bistarde rostie. Tourte de blanc manger.
Gigot de mouton boully.
Cabris frisez, & rosty orenge.
Moulle de bœuf en potage.
Pastez pouplin de perdris.
Gras veau rosty en adobe. Hairon rosti.
Lievre en potage.
Pasté de venaison chaud.
Grue rostie en olive. Perdris boullie aux capes.
Craems vogel rosty
Sanglier rosty. Poictrine de veau farcie boullie.
Mouton rosty & remorasque.
Veau revestu boully. Ploniers rostis.
Cerf en potage. Chappon en potage de Hongrie. Pegasine
d’eau rosty.
Oiselets en potage. Canar rosty à la dodine.

Second service.
Faysant rosty, saulse reale.
Gras veau rosty. Pastez de Cabris.
Cerf rosty. Rafioule de moulle de
bœuf. Hulpe rostie.
Craems vogel en potage.
Begasse rostie. Pastez de chappon.
Butor rosty. Sanglier en potage.
Chevreux rostis.
Tourte de veau à la creme.
Perdris rostie à saulse de peignoles.
Lievre rosty.
Cygne rosty à saulse Cremonese.
Aigrette rostie. Pouille de bois rostie.
Rafioule de blanc manger fueiltee.
Lepelaire rostie. Veau revestu rosty.
Pasté enragé. Cabris en potage.
Pastez d’Angleterre.
Pigeon boulli farcy. Canar en potage.
Cerselle rostie. Gigot de mouton
revestu. Oyson sauvage rosty.

Troisiesme service.
Pastez de pouille de bois revestu.
Bistarde rostie froide. Pasté de faisant.
Blanc manger en forme.
Gelee en forme dressee.
Cigne sauvage rosty froid.
Gelee de coschon.
Pasté de perdris revestu.
Coq d’Inde rosty froid,
Pasté de perdris, Grue rostie.
Huistres en potage, Pastez de paons.
Sausisse de Bologne. Pastez de sanglier.
Fonge en potage. Cerf rosty.
Esturgion boully. Pastez de chevreux.
Iambon de Mayence.
Hurres de sanglier bouillies.
Pasté de hairron. Tartoufle boullie.
Pastez de cerf. Gelee passementee.
Anchoue. Pastez de bystarde.
Truite en adobe. Escrevice de mer.
Pasté de pouille d’Inde. Gelee lardee.
Pasté de hulpe. Huistre rostie.
Pasté de butor. Brenne d’Angleterre.
Seulette en adobe. Pasté de canar.
Pasté d’aigrette. Turbote en adobe.
Cafiade d’esturgion. Pasté de lievre.
Langue de bœuf enfumee. Sanglier
rosty. Rouge en adobe. Fonge frite,
Pasté de grue. Piece de sanglier boulli.

Toutes les venaisons rosties froides estoient auec les pieds dorez, & tous les pastez revestus dorez, & portans banieres.
Tous les seigneurs estoient defroiés, chacun venoit au palais querir sa viande crue, & tout ce qu’ilz avoient besoing, espiceries & succre.

Quatriesme service.
Grand marsepain doré. Paste de genua.
Sucades liquides. Gaufle succrée.
Pastez de coing. Caneline Romaine.
Marmelade blanche. Gelee blanche clere.
Pistachine. Tarte reale.
Caneline longue. Pasté d’orenge.
Lard d’amandes. Beurre de may.
Oublies. Gelee rouge clere.
Amandes succrees. Tourte de pommes.
Canelle succree. Moustacholle.
Succade seche. Friture bugnole.
Pasté de succre. Samblette.
Palamitte. Marmelade en forme.
Tourte de creme. Pesche confite.
Orenge confite auec les fleurs.
Gelee de glace. Offaelle fueiltee.
Grand biscuit succré, Friture de seringe.
Crenelle de succre. Grand castelin.
Capes confites. Poires confites.
Neige sur rosmarin. Pommes crudes.
Anis. Parmesan. Prunes de Hongrie
confites, Gasteaux fueiltés. Castagne.
Morquin. Rosquille. Biscotelle.

Il y avoit quatre parcs de deux pieds en quarrure, environnez d’une haye de beurre.
- Le premier estoit Adam & Eve faicts de beurre, un serpent sur l’arbre, & une fontaine courante, avec petits animaux à l’entour du beurre.
- Le deuxiesme parc estoit les amours de Pyramus & Tisbe, le lyon aupres de la fontaine, & des arbres à l’entour environné en une haye de beurre.
- Le troisiesme parc la chasse d’Acteon, & les nymphes auec Diana à la fontaine, & puis des petits chiens de beurre.
- Le quatriesme parc estoient deux hommes sauuages, qui se battoient l’un l’autre avec des masses aupres d’une fontaine, & des petits lions de beurre à l’entour: chacun parc avoit quatre banieres.

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Messialot - François

Écrit par Lucullus. Publié dans Les personnages.

MessialotNé à Limoges en 1660
Mort à Paris en 1733

Il a travaillé comme officier de bouche pour plusieurs familles nobles et différentes cours. Il a laissé plusieurs ouvrages fort célèbres en son temps, auxquels se sont référés d'autres chefs et les historiens de la cuisine.

On lui doit notamment l'invention de la crème brûlée, sans doute adaptée de la crème catalane

Dès 1691 il met en avant dans son ouvrage le bœuf miroton. Le miroton correspondait alors à des tranches de veau, du lard, disposés sur une farce.

Célèbre recette qui perdure jusqu'à aujourd'hui selon plusieurs variantes. 1746 par Menon dans " la Cuisinière bourgeoise". On le retrouve au XIXe siècle avec le "miroton de boeuf bouilli à la bourgeoise " (1820) ou le "Miroton à la mode de l’île Saint-Louis" (1839).
Ce plat de concierge ou de ménage parisien est cité par Balzac dans le Cousin Pons (1847).

Œuvres :
- Le Cuisinier roïal et bourgeois, qui apprend à ordonner toute ſorte de Repas en gras & en maigre, & la meilleure maniere des Ragoûts les plus delicats & les plus à la mode. Ouvrage tres-utile dans les Familles, & ſingulierement neceſſaire à tous Maîtres d'Hôtels, & Ecuiers de Cuiſine
Ouvrage publié sans le nom de l'auteur en 1691 réédité en 1693, 1698, 1705.

- Nouvelle Instruction pour les confitures, les liqueurs et les fruits, 1692.

- Le Nouveau cuisinier royal et bourgeois. Qui apprend a ordonner toute sorte de repas en gras & en maigre, & la meilleure maniere des ragoûts les plus délicats & les plus à la mode , & toutes sortes de pâtisseries. Ouvrage tres-utile dans les Familles, & ſingulierement neceſſaire à tous Maîtres d'Hôtels, & Ecuiers de Cuiſine.
Publié en 3 tomes entre 1722 et 1730 sans le nom de l'auteur.
Augmenté de nouveaux ragouts par le sieur Vincent de La Chapelle, chef de cuisine de S. A. S. monseigneur le Prince d'Orange & de Nassau, &c. ; 1740 ; en 3 tomes.
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Menon - Joseph

Écrit par Lucullus. Publié dans Les personnages.

MenonJoseph Menon
Né vers 1700
Mort le 14 juillet 1771 à Verneuil-sur-Avre

Joseph Menon est un auteur culinaire français qui vivait dans la seconde partie du XVIIIe siècle.
On ne sait pas grand-chose de Joseph Menon, rien de son lieu de naissance, de ses parents, de sa jeunesse.

On sait qu’il a été officier de bouche chez la reine Marie Leczinska, charge qu’il abandonne sans doute au plus tard en 1738.

Le 15 mai 1752 il demeure tout d’abord rue de Richelieu, paroisse Saint-Eustache
Le 31 août 1760 il demeure rue des Fontaines-du-Temple, paroisse Saint-Nicolas-des-Champset Le 19 juillet 1766 il est domicilié rue Le Regrattier, île et paroisse Saint-Louis.

Il décède et est inhumé le 14 juillet 1771 paroisse Sainte-Madeleine de Verneuil-sur-Avre (Eure), à 71 ans.

Son épouse, Jeanne-Marie Driessen, quant à elle, décède le 23 février 1766 et est inhumée le surlendemain à Nogent-sur-Seine (Aube), à environ 67 ans.

Louise, leur fille est née à Paris en avril 1734 elle y décède le 30 décembre 1809. Elle est inhumée le lendemain au sein d’une concession temporaire du cimetière du Père-Lachaise.

C’est un auteur culinaire prolixe qui a marqué son temps. C’est une référence de la cuisine du 18eme siècle.



Ouvrages principaux
• Nouveau Traité de la Cuisine ;
• La Cuisinière bourgeoise ;
• La Science du Maître d’Hôtel cuisinier ;
• La Science du Maître d’hôtel confiseur ;
• Les Soupers de la Cour, Paris, Guillyn ;
• Cuisine et Office de Santé ;
• Traité historique et pratique de la Cuisine ;
• Le Manuel des officiers de bouche ;
• Almanach de cuisine ;
• Almanach d’office.

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Fayolle - Françoise

Écrit par Lucullus. Publié dans Les personnages.

FayolleLa Mère Fillioux
Née le 2 septembre 1865 à Auzelles (Puy-de-Dôme)
Décédée le 22 octobre 1925 à Lyon (Rhône)

Françoise Fayolle née Benoîte Fayolle, a vu le jour à Auzelles, petit village d'Auvergne dans le canton de Cunlhat dans le Puy de Dôme. Son père Annet Fayolle est peigneur de chanvre et sa mère Marie Mariotte est mère au foyer. Françoise est l'aînée de dix filles. La famille est installée à Fayet, lieu dit attaché à Auzelles. C’est là qu’elle va passer son enfance, dans les monts du Livradois à 25 km d’Ambert.

A l’adolescence, elle quitte sa campagne pour travailler à Grenoble dans une famille bourgeoise, puis à Lyon. Là, elle est employée par Gaston Eymard, directeur de compagnie d’assurance et fin gastronome. C’est là, pendant 10 ans, qu’elle apprend les secrets de la gastronomie lyonnaise.

Elle épouse Louis Fillioux. Elle crée, avec son époux, un bistrot sis au 73, rue Duquesne, à Lyon, dans un immeuble appartenant à son beau-père, au nom "Fillioux, marchand de vins".

C’est Françoise qui fait la cuisine et rapidement il y a de la clientèle et les habitués se pressent, notamment les parieurs de l'hippodrome de Villeurbanne non loin de là. La clientèle est fidèle. À cette époque, le casse-croûte coûtait 1,25 franc et le menu complet de cochonnailles 3,50 francs.

La qualité de la cuisine et le bouche à oreille font leur œuvre. Petit à petit, son restaurant accueille des vedettes de cabaret et de music-hall de passage.

La cuisine lyonnaise est célèbre. Ce sont les "Mères " qui en sont les porte-parole. L’essor des chemins de fer fait affluer les touristes à Lyon et va faire rayonner leur savoir-faire.

A cette époque en France, le Français s’exprimait en patois, en langues régionales. Françoise Fayolle comprend vite la nécessité de se faire comprendre du plus grand nombre est adopte le français. Son succès est immense. Le Bistrot Filloux devient vite un incontournable de la gastronomie lyonnaise et pendant 30 ans il va servir le même menu qui ne varia guère : potage velouté aux truffes, quenelles au gratin au beurre d’écrevisse, culs d'artichaut au foie gras, poularde demi-deuil, fromages, desserts.

Celle qui est devenue la Mère Fillioux, surnommée l’impératrice des Mères, a créé la poularde demi-deuil et en aurait préparé 500.000 durant sa vie. Il est raconté qu’elle les faisait cuire par lot de 15 dans la même marmite et qu’elle conservait ce bouillon de cuisson, d’une fournée à une autre. C’est une légende de la gastronomie et les nombreuses cartes postales en sont la preuve. Les riches étrangers de passage dans la capitale des Gaules ne pouvaient faire autrement que d’y dîner.

Elle a su assurer la qualité de ses mets en favorisant les produits locaux. Ces poulardes viennent d’élevages locaux et ses gibiers à plumes des Dombes toutes proches.

Elle attire les apprentis dont une certaine Eugénie Brazier qui deviendra la Mère Brazier, première femme a obtenir 3 étoiles au guide Michelin en 1933. Exploit qu’elle renouvellera avec son 2ème restaurant. Eugénie Brazier qui formera Paul Bocuse le pape de la gastronomie de la seconde moitié du XXe siècle. Un siècle de transmission de l’excellence gastronomique lyonnaise.

Françoise Fillioux décède le 22 octobre 1925 à Lyon à l’âge de 60 ans. Avec son décès se tourne une page importante de l’histoire de la gastronomie lyonnaise.
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Stohrer - Nicolas

Écrit par Lucullus. Publié dans Les personnages.

Stoher 01Né en 1706 à Wissembourg
Mort en 1789 à Paris

Nicolas Stohrer est né dans une famille modeste du nord de l’Alsace à Wissembourg à la frontière actuelle avec l’Allemagne. A l’âge de 14 ans, le jeune Nicolas commence son apprentissage de pâtissier dans les cuisines du roi déchu de Pologne et grand-duc de Lituanie Stanislas Leszczynski à Wissembourg.

L’ancien roi de Pologne et grand-duc de Lituanie a d’abord trouvé refuge auprès du duc des Deux-Ponts. À la mort de ce dernier, Stanislas est accueilli par le régent de France qui lui met à disposition une résidence à Wissembourg et lui octroie une modeste rente permettant d’entretenir une petite cour dans la cité alsacienne.

Bien qu’ayant des moyens limités, le monarque n’en attache pas moins une grande importance à la qualité de sa table. Le jeune Nicolas, simple garçon de cuisine à ses débuts, devient assez rapidement écuyer de cuisine en charge de la pâtisserie froide et chaude et des ragoûts et entremets. C’est là qu’advient la première fulgurance de Nicolas Stohrer.

Nicolas confectionne pour le roi et sa famille des kouglofs, brioche sèche typiquement alsacienne. Le roi Stanislas aime bien les kouglofs qui lui rappellent les Babkas polonaises mais les trouve un peu sèches à son goût. Là bas, en Pologne, il les arrosait parfois de vin de Hongrie. Il s’en ouvre aux cuisines et Nicolas Stohrer décide alors de revisiter le kouglof en l’imbibant de Madère et en le garnissant de crème pâtissière avec des raisins frais et secs. Le Baba est né mais il ne porte pas encore ce nom.
Baba au Rhum Stohrer

Stoher 02Le nom du baba est sujet à discussion. Une légende voudrait que cela vienne du livre Ali Baba, livre beaucoup apprécié du roi Stanislas mais plus sérieusement je penche pour la version revisitée de Babka qui veut dire grand-mère en polonais. Avec le temps, le rhum supplante le Madère et la crème Chantilly, la crème pâtissière.

En 1725, le roi Stanislas marie sa fille Marie Leszczynska au roi de France Louis XV. Les voilà partis, tout comme Nicolas, alors âgé de 19 ans pour Chambord puis Meudon. C’est à cette époque que Marie Leszczynska demande à son père de lui permettre de prendre à son service le jeune pâtissier. Nicolas Stohrer s’en va donc à Versailles rejoindre la cour du roi.

A la cour de Versailles où Nicolas travaille pour la reine Marie, les puits d’amour créés par Vincent de la Chapelle, pâtissier de Madame de Pompadour, font les délices de la cour. Afin de plaire à la Reine et en s’inspirant des pâtisseries sucrées à pâte feuilletée, Nicolas Stohrer crée une entrée salée. Comme pour le puits d’amour Nicolas Stohrer lui donne un nom à connotation érotique, la Bouchée à la reine. Elle est servie chaude. Elle est réalisée avec une croustade individuelle en forme de timbale, en pâte feuilletée, remplie d’une garniture salée composée d’ingrédients variés – volaille, ris de veau, champignons – coupés en petits dés ou lamelles et liés par une sauce épaisse. Le roi et la cour en sont enchantés.

En 1730, il a alors 25 ans, Nicolas Stohrer décide de tenter sa chance et ouvre une boutique au 51 de la rue Montorgueil non loin de l’église Saint-Eustache, à Paris. Cette boutique existe toujours et c’est la plus vieille pâtisserie de Paris.

Nicolas Stohrer laisse donc à la postérité deux grandes réalisations qui sont aujourd’hui des références en matière de pâtisserie et de gastronomie, le Baba au rhum et la Bouchée à la Reine. On lui doit également d’autres réalisations.

Un peu d’histoire en suivant :
- 1806, dans son Almanach gourmand, Grimod de la Reynière parle du Baba.
- 1815 Antonin Carême, alors cuisinier de Talleyrand, l’évoque dans son -Pâtissiers Royal-.
- 1835 le pâtissier parisien Stohrer, descendant du pâtissier polonais, remplace le malaga par du rhum pour imbiber les babas.
- 1844, cette pâtisserie inspire les frères Julien qui inventent le Savarin
- 1864, elle est décorée par le peintre Paul Baudry. L’immeuble comporte un bas relief qui surmonte le portail : un globe terrestre est entouré des attributs des arts et des lettres.
- 23 mai 1984, la pâtisserie Stohrer est inscrite aux monuments historiques de la France.

Longtemps dirigée par Pierre Liénard, elle a été reprise en 2017 par la famille Dolfi, qui avait précédemment repris une ancienne chocolaterie ouverte en 1761 et dénommée "A La Mère de Famille".

En 1999 les éditons Lattès ont publié des mémoires apocryphes de Nicolas Stohrer. Imaginées par Pierre Liénard et Françoise Duthu, elles ont été rédigées par Claire Haughel.
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